Assurance crédit immobilier : le CCSF impose des normes

L'information a été rendue officielle le 13 janvier dernier, mais n'émerge que maintenant. Après de longues années d'efforts au travers de l'application des lois Lagarde, Chatel et Hamon, l'emprunteur va désormais pouvoir faire jouer la concurrence sur l'assurance de son crédit immobilier. Certes il en avait déjà le droit, mais sa marge de manœuvre était limitée à cause de la position de supériorité des banques, les plaçant en situation de quasi-monopole. À partir du 1er mai 2015 elles seront obligées de justifier leurs exigences, en choisissant au moins 11 garanties parmi les 18 standardisées. Au 1er octobre 2015, toutes les dispositions prévues relatives à l'équivalence du niveau de garantie en assurance emprunteur devront être respectées.

L'emprunteur est désormais mieux armé face à sa banque

En 2011 l'arrivée de la loi Lagarde devait mettre un terme à la longue domination des banques, sur le secteur de l'assurance des crédits immobiliers. Désormais elles n'avaient plus le droit d'imposer leur propre formule, l'emprunteur se voyant attribuer celui de rechercher un contrat moins cher auprès d'un assureur externe. L'époque de la confrontation entre le contrat d'assurance de groupe (celui des banques, plus cher) et de délégation (celui des assureurs externes, moins cher) devait commencer. Mais dans la pratique il n'en fut rien, car les prêteurs disposaient toujours du droit de refuser le contrat concurrent, sous prétexte que les garanties n'étaient pas suffisamment étendues.

Même résultat lorsque la loi Chatel obligea les assureurs des banque à inscrire leurs conditions de résiliation lisiblement sur leurs contrats. L'emprunteur disposait alors d'un certain laps de temps pour trouver un assureur moins cher, et économiser ainsi plusieurs milliers d'euros. Même résultat lorsque la loi Hamon apparut pour permettre aux accédants à la propriété de subtiliser leur assurance de groupe pour une délégation moins chère, dans un maximum de 12 mois après la signature du contrat de prêt.

A chaque tentative les banques rétorquaient que les garanties prévues par le contrat concurrent, n'étaient pas complètes.

À partir du mois de mai elles pourront toujours le dire, mais devront se justifier. À partir du 1er octobre elles devront même faciliter les recherches de leurs clients.

 

Une liste de 18 garanties standards à l'assurance-crédit

Obligation de transparence de l'assureur envers l'assuré

La version finale de la liste des équivalences des garanties de l'assurance emprunteur a finalement été acceptée par les banques, les assurances et le CCSF (Comité Consultatif du Secteur Financier)

Les professionnels de l'assurance auront désormais l'obligation de remettre une fiche standardisée d'information (FSI) à l'assuré, tel que le prévoit la loi du 17 mars 2014 sur la consommation. Cette fiche comporte 18 garanties, en face desquelles se trouvent des cases à cocher. Lorsque l'assureur coche « oui », cela signifie qu'il exige ce type de garantie. Mais il y a mieux, car il doit également répondre à des informations détaillées, ce qui apporte un effet doublement positif. En premier lieu l'assureur concurrent peut désormais établir un contrat acceptable, mais surtout l'emprunteur sait désormais dans quelles conditions il est assuré.

Franchise, exclusion et autres renseignements importants

L'assureur devra désormais renseigner son client sur la franchise de sa garantie incapacité, pouvant s'étendre de 30 jours à 180 jours. Même obligation du côté de la garantie perte d'emploi, la franchise pouvant aller de 60 jours à 120 jours.

Nombre d'emprunteurs s'étaient retrouvés avec une indemnité moindre par rapport à ce qu'ils espéraient. Levée de la couverture en cas d'inactivité, diminution des prestations en cas de changement de profession, exclusion de certaines affectations psychiatriques ou dorsales, la déception était à hauteur de la frustration.

Les sportifs sauront désormais si l'ensemble des garanties décès, PTIA (Perte Totale et Irréversible d'Autonomie), invalidité et incapacité couvre également la pratique de leur sport amateur. Les voyageurs à titre professionnel ou humanitaire, ou encore à titre personnel, sauront désormais si leur assurance-crédit les couvre lors de leurs déplacements.

On ne compte plus les emprunteurs s'étant retrouvés obligés de restructurer leurs dettes suite à une incapacité partielle au travail. Désormais ils sauront qu'il existe des contrats prenant en charge 50 % de leur quotité de mensualités afin de couvrir ces situations.

Des surprises pour les emprunteurs au 1er mai 2015 ?

C'est au 1er mai 2015 que les garanties standards entreront en application. À cette date lorsqu'un emprunteur présentera un contrat d'assurance concurrent à sa banque, cette dernière devra motiver son refus en présentant la liste des garanties cochées.

Les emprunteurs découvriront avec stupeur que le contrat qu'ils avaient signé, ou qu'ils étaient en passe de signer, ne les couvrait qu'au minimum. Certains s'apercevront que leur assurance emprunteur ne les aurait indemnisés suite à une invalidité pour affections dorsales, que si leur pathologie aurait nécessité un séjour d'au moins 10 jours à l'hôpital avec intervention chirurgicale. Beaucoup parmi ceux qui avaient pris soin de souscrire une garantie perte d'emploi s'apercevront alors que celle-ci dépendait de leur ancienneté en CDI.

 

Vers une assurance de groupe moins chère ?

Les courtiers en prêt immobilier ont toujours rêvé de disposer d'un levier suffisant, pour être en mesure de se servir de l'assurance-crédit pour mieux négocier. Dans l'idéal ils demanderaient à leurs banques partenaires de faire un effort sur leur taux nominal, en échange de la souscription de leurs propres formules d'assurance.

Mais dans la pratique les banques leur répondaient souvent : « montrez-moi ce contrat concurrent que je vois s'il correspond à nos exigences ». La réponse revenait très vite du département juridique : « non ».

Avec la mise en place des normalisations, au 1er octobre 2015 les banques devront procurer la liste des garanties obligatoires à leurs clients. Il y a fort à parier que celles-ci soient obligées de mettre de l'eau dans leur vin pour ne pas perdre du marché au profit de la concurrence. Cependant la loi Hamon permettra toujours aux emprunteurs de changer de contrat, même s'ils s'engagent à accepter celui de la banque en échange d'un effort sur le taux.

À court terme les prêteurs n'auront d'autre choix que celui d'assouplir leurs conditions, peut-être en appliquant leur taux de cotisation sur le capital restant dû, plutôt que sur le capital emprunté ? Affaire à suivre.