Villes et qualité de vie : la France en queue de peloton

De la qualité de vie dans une ville dépend la rentabilité d’un investissement immobilier : le locataire d’une ville où il fait bon vivre est susceptible de rester plus longtemps, la maison que vous avez achetée va gagner en valeur, etc. Mais comment est la qualité de vie des villes françaises ? C’est à cette question que s’est attaquée une étude menée par la Commission européenne parue en février dernier. Et la réponse ne risque pas de flatter notre orgueil gaulois.

La Commission européenne mène l’enquête

L’étude diligentée par la Commission européenne sous le titre « Qualité de vie dans les villes européennes », et consultable sur ce lien, s’est intéressée à la satisfaction de quelques 40 000 personnes vivant dans 83 villes situées sur le continent européen (Turquie comprise). Les citadins interrogés ont attribué des notes à plusieurs types de services : éducation, infrastructures culturelles et sportives, transports publics et services administratifs. Ils ont également été questionnés sur leurs habitudes de déplacement, sur leur vision de la sécurité, sur la qualité de l’air, sur la pollution sonore, et sur ce qu’ils pensent de l’immigration. Le tout en comparaison avec une précédente étude menée en 2012.

Taux de satisfaction des citadins

Les résultats sont très éclairants – et, au premier abord, très positifs. On note ainsi que 80 % au moins des personnes interrogées se disent satisfaites de la ville dans laquelle elles ont élu domicile, quelle que soit la ville en question, à l’exception de 6 cas. Ce taux monte au-delà de 98 % pour les 5 villes où la qualité de vie est la meilleure :

  • Oslo et Zurich (99 % de taux de satisfaction)
  • Aalborg, Belfast et Vilnius (98 %)

En revanche, ce taux descend sous la barre des 80 % dans 6 villes :

  • Miskolc (Hongrie, 79 % de taux de satisfaction)
  • Naples (75 %)
  • Le Grand Athènes (toute l’agglomération athénienne, 71 %)
  • Palerme et Athènes (67 %)
  • Istanbul (65 %)

Athènes et Istanbul sont aussi les deux villes qui ont connu l’évolution la plus importante du taux de satisfaction depuis la précédente enquête en 2012 : alors que les habitants d’Athènes et du Grand Athènes se disent nettement plus satisfaits qu’auparavant (+ 15 %), ceux d’Istanbul vont de mal en pis (+ 14 %).

La question du logement

Parmi les nombreux indicateurs pris en compte pour cette étude, celui du logement nous intéresse de près. Selon l’enquête de la Commission, le fait de pouvoir trouver un logement à un prix raisonnable est perçu comme un défi par la plupart des citadins interrogés dans plus de la moitié des villes sélectionnées. Dans 45 villes sur 79 (on ne compte pas les 4 agglomérations qui englobent déjà une ville : Grand Paris, Grand Lisbonne, Grand Athènes et Grand Manchester), une majorité d’habitants considère qu’il n’est pas facile de trouver où se loger à des prix acceptables.

Un sentiment qui s’aggrave largement dans les capitales : dans 9 d’entre elles, ils sont 80 % à souligner cette difficulté. Toutes les capitales sélectionnées sont concernées, à l’exception d’Athènes, dans laquelle 62 % des personnes interrogées estiment que c’est relativement facile. Les mauvais élèves sont Amsterdam, Berlin, Copenhague, Dublin, Helsinki, Londres, Luxembourg, Stockholm… Et Paris, bien entendu. Paris et le Grand Paris font partie des villes où le sentiment de ne pas pouvoir trouver à se loger convenablement est le plus fort : respectivement 95 % et 92 %.

Qualité de vie dans les villes françaises

6 villes françaises ont participé à cette grande enquête (ou 7 si l’on compte le Grand Paris comme une ville à part entière). C’est Rennes qui arrive en tête de ce classement des cités de l’Hexagone, avec un taux de satisfaction de 95 % des personnes interrogées, mais en 28e position seulement. Voici le détail :

  • Rennes (95 % en tout – 52 % sont très satisfaits ; 43 % sont plutôt satisfaits)
  • Bordeaux (94 % en tout – 60 % ; 34 %)
  • Strasbourg (93 % en tout – 49 % ; 44 %)
  • Paris (87 % en tout – 41 % ; 46 %)
  • Lille (86 % en tout – 37 % ; 49 %)
  • Grand Paris (83 % en tout – 36 % ; 47 %)
  • Marseille (80 % en tout – 34 % ; 46 %)

Il est surtout intéressant de regarder les taux de forte satisfaction qui mettent Bordeaux en tête du classement, sans changer le reste de l’ordre. Le Grand Paris et Marseille arrivent toujours en avant-dernière et dernière positions.

La vision des Français sur le logement

Concernant le critère du logement, les villes françaises se trouvent généralement reléguées dans la seconde moitié du classement des cités européennes. Seulement 43 % des personnes interrogées estiment qu’il est « facile de se loger à des prix raisonnables » à Rennes, et le chef-lieu de la Bretagne arrive pourtant en première position du panel hexagonal. Bons derniers se trouvent Paris et le Grand Paris, avec respectivement 4 % et 7 % seulement – ce qui veut dire qu’une moyenne de 94,5 % des personnes interrogées estiment qu’il est difficile, voire très difficile, de trouver un logement à un prix convenable dans Paris et son agglomération. Voici le détail par villes :

  • Rennes (43 %)
  • Strasbourg et Marseille (28 %)
  • Lille (26 %)
  • Bordeaux (25 %)
  • Grand Paris (7 %)
  • Paris (4 %)

En comparaison, les villes européennes dont les habitants sont positifs quant au logement atteignent des taux de satisfaction de 71 % (Oulu, en Finlande), 64 % (Braga, au Portugal), 62 % (Malaga, en Espagne), 62 % (Athènes) et 61 % (Oviedo, Aalborg et le Grand Athènes).

On note aussi que, parmi toutes les capitales testées, c’est Paris qui arrive dernière pour ce qui est de trouver un logement à un prix raisonnable !

Autres critères pour les villes françaises

Heureusement, il n’y a pas que le logement qui fonde une bonne qualité de vie. Dans au moins 2 critères, les villes hexagonales enregistrent de bons résultats : la confiance en l’administration et la présence des étrangers.

  • Confiance en l’administration : Rennes, Strasbourg et Bordeaux paradent dans le top 12 des villes européennes où les personnes interrogées estiment qu’elles peuvent avoir confiance en leur administration et dans leurs services publics, avec respectivement 77 % (pour Rennes et Strasbourg) et 75 % (Bordeaux).
  • Présence des étrangers : dans 6 villes, une majorité des personnes interrogées estiment que la présence des étrangers dans leur cité est une bonne chose. Elles sont 78 % à Paris, 69 % à Rennes, mais seulement 55 % à Marseille.

Cependant, pour ce qui est du sentiment de sécurité, nos villes tombent une fois de plus dans les profondeurs du classement européen. Hormis Bordeaux, Strasbourg et Rennes, qui se distinguent avec plus de 75 % de sondés qui se sentent en sécurité, les autres se situent invariablement dans la seconde moitié du tableau :

  • Bordeaux (85 % des habitants disent se sentir en sécurité)
  • Strasbourg et Rennes (76 %)
  • Paris (74 %)
  • Grand Paris (67 %)
  • Lille (59 %)
  • Marseille (48 %)

En comparaison, les villes européennes dont les citadins se sentent le plus en sécurité sont : Zurich (97 %), Aalborg, Munich et Oviedo (96 %), Copenhague et Groningue (95 %), Stockholm (94 %), Helsinki (93 %).

Quels enseignements en tirer pour l’investissement immobilier ?

Bien qu’il faille prendre cette enquête avec les pincettes nécessaires, compte tenu de la subjectivité des réponses et du grand nombre des critères pris en considération, le rapport de la Commission européenne nous livre néanmoins un bilan passionnant de la façon dont les Français perçoivent leurs villes. On y voit que leur satisfaction est moyenne en regard des autres villes européennes citées dans l’étude, et surtout que leurs rapports au logement et à la sécurité sont complexes.

Or, au moment d’investir dans un bien immobilier, la notion de qualité de vie prend tout son sens. Du moins pour un investissement à long terme. Il y a trois façons de regarder les taux d’insatisfaction des Français par rapport à la difficulté de trouver un logement à des prix raisonnables :

  • Le regard du futur propriétaire : des logements à des prix trop élevés impliquent des difficultés importantes pour trouver à acheter, et pour obtenir un crédit immobilier auprès d’une banque.
  • Le regard de l’investisseur : si le logement est cher, cela signifie qu’il est rentable, ou du moins que les montants des loyers et les taux d’occupation importants vont compenser le prix élevé payé à l’achat.
  • Mais il y a également un 3e regard, celui de l’investisseur plus prudent, qui souhaite s’engager sur un long terme : des loyers trop élevés augmentent les risques d’impayés, et nécessitent de prendre des mesures préventives (par exemple une assurance sur le prêt immobilier pour se préparer à d’éventuelles difficultés de remboursement).

C’est pourquoi une ville dont la qualité de vie est meilleure est un parti plus intéressant pour un investissement immobilier : heureux, les locataires ont tendance à rester. Et ils sont heureux parce qu’ils ont accès à des emplois, profitent d’excellents services publics et sont entourés de bonnes écoles pour leurs enfants. Les locations se font alors sur de longues années, on évite le turn over trop fréquent et les risques d’impayés.

En résumé, il n’est pas nécessairement rentable d’investir dans un bien locatif sur Paris ou en banlieue parisienne (et les taux de rentabilité 2015 le prouvent, voir ce bilan de l’année immobilière. Mieux vaut regarder les villes où l’on vit mieux, pour un meilleur retour sur investissement.