Investissement locatif :Faut-il louer son bien vide ou meublé?

En général, les bailleurs choisissent de mettre leur bien en location vide. Pour des raisons pratiques. Mais est-ce vraiment le meilleur choix? Quel mode de location peut bénéficier d'une fiscalité particulièrement attractive ? Zoom sur le statut de Loueur meublé non professionnel (le LMNP).

Vous avez acheté un bien à rénover entièrement dans une grande agglomération ? Vous l'avez refait à neuf. Et maintenant vous hésitez à le louer vide ou meublé... Comment choisir les meubles ? Et si le locataire les dégradaient ? Le risque de vacance locative n'est-il pas plus élevé en meublé ? Bref, autant de questions et de craintes qui vous conduisent à opter pour la simplicité : la location nue.

Après réflexion, vous préférez, en effet, que le locataire signe un bail de 3 ans, renouvelable par tacite reconduction. Moins de soucis et de contraintes en vue. Et si au final, ce n'était pas le meilleur choix ? Il faut savoir que la location meublée offre de multiples atouts : tout d'abord les loyers sont plus élevés de 15 à 20% par rapport à la location vide. Même si la location meublée est moins répandue, il existe une réelle demande, qui est croissante. Des jeunes, qui sont mobiles, et ne veulent pas s'embarrasser avec des meubles par exemple. D'autres qui démarrent dans la vie active et n'ont pas encore le budget nécessaire pour s'acheter du mobilier…

De plus, le bail est plus souple : un an, prorogeable tacitement. Cette durée peut être abaissée à 9 mois si l'occupant est un étudiant.

Flou juridique autour de la notion de "courte durée"

Vous avez également la possibilité de louer votre bien meublé pour des durées plus courtes. 3 mois, 4 mois, 5 mois et demi...Ce n'est plus de la location meublée à titre de résidence principale mais visant à accueillir par exemple des cadres internationaux en mission ou des personnes en formation à distance de leur domicile... Dans ce cas, le propriétaire établit un bail de droit commun (soumis au code civil) de date à date, c'est-à-dire sans tacite reconduction.

Et il y a également de la location de très courte durée, à la nuitée, à la semaine, c’est celle-ci qui en réalité est dans le viseur du législateur.

Dans quel cas l’autorisation de changement d’usage est-elle obligatoire ?

Un flou juridique plane en effet sur la location de courte durée depuis la publication de la loi ALUR au Journal officiel le 24 mars 2014. Trois ans plus tard,« il n'y a toujours pas de jurisprudence de la Cour de cassation sur la notion de "courte durée".  Mais il y a quand même quelques certitudes », assure Maud Velter, directrice associée de Lodgis.

Tout d’abord, « le propriétaire qui veut louer son logement à la nuitée ou à la semaine à des touristes doit obtenir une autorisation de changement d'usage. A l’inverse, le propriétaire qui loue pour des durées de 9 mois ou 1 an n'a besoin d'aucune autorisation. Tout comme le propriétaire qui loue sa résidence principale. En effet, lorsque le logement meublé constitue la résidence principale du bailleur, c'est-à-dire qu'il l'occupe 8 mois par an, aucune autorisation de changement d’usage n'est nécessaire pour le louer en « meublé touristique », ni aucune déclaration en Mairie n’est à effectuer », certifie Maud Velter.

« Cependant la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 a complété l'article L 324-1-1 du Code du tourisme. Désormais, dans les communes où le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable, une délibération du conseil municipal peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la commune toute location pour de courtes durées d'un local meublé en faveur d'une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile. En principe un service de télédéclaration devra être mis en place par la commune. La déclaration donne lieu à la délivrance sans délai par la commune d'un accusé-réception comprenant un numéro de déclaration. Un décret devra déterminer les informations qui pourront être exigées pour l'enregistrement. Le numéro de déclaration devra figurer sur toute les offres de location », rapporte Maud Velter.

Amende multipliée par deux  : 50 000 euros !

Désormais, le code de la construction et de l’habitation prévoit que toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L 631-7 sera condamnée à une amende civile de 50 000 euros. Cette amende, qui était précédemment de 25000 € a été modifiée par la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle », indique Maud Velter. Autrement dit, dans une ville de plus de 200 000 habitants ou en Ile de France, si un propriétaire loue son logement pour de "courtes durées" à des touristes, sans avoir obtenu au préalable une autorisation de changement d'usage, il encourt une amende civile de 50 000 euros.

Le mobilier et équipements obligatoires sont-ils suffisants ?

Si vous misez sur la location meublée d'un an ou 9 mois, règlementée par la loi du 6 juillet 1989, il existe des astuces pour éviter d'être trop souvent dérangé par le locataire, en vous référant strictement à la liste du mobilier et équipements obligatoires, entrée en vigueur le 1er septembre 2016 : "Je n'installe pas de télévision, ni de wifi, ce qui m'évite un tas d'ennuis", témoigne Bertrand de Raymond, président de la société Capcime spécialisée en investissement locatif ancien.

Certes, ces deux équipements ne sont pas mentionnés sur la liste obligatoire définie par décret, mais attention pour cibler une clientèle haut de gamme en location meublée de plus courte durée, ces éléments sont, en revanche, indispensables. D’ailleurs, « à Paris, nous constatons que les logements meublés, même destinés à la longue durée, doivent être parfaitement équipés pour répondre à la demande des locataires. Il est difficile de se contenter de la liste des 11 équipements rendus obligatoires par décret du 31 juillet 2015 », met en garde Maud Velter.

Régime microbic ou régime réel ?

A noter que le bailleur d'un appartement meublé peut prétendre fiscalement au statut de Loueur meublé non professionnel (LMNP). Un statut ultra performant. Les loyers encaissés ne sont pas considérés comme des revenus fonciers mais comme des bénéfices industriels et commerciaux (BIC). Le bailleur a le choix pour les déclarer entre le régime microbic ou le régime réel. Avec le microbic, vous bénéficiez d'un abattement forfaitaire de 50% sur les recettes locatives.

Le régime réel d'imposition, quant à lui, permet de déduire les charges pour leur montant réel et justifié. Le bénéfice taxable correspond à la différence entre le montant des loyers encaissés et les charges et amortissements déductibles. Il s'applique d'office dès lors que les recettes tirées de la location meublée sont supérieures à 33 100 € par an (plafond actualisé pour 2017, au lieu de 32 900 € par an auparavant). Il s'applique également sur option quelque soit le montant des recettes locatives. La demande doit être envoyée en recommandé auprès de l'Administration fiscale avant le 1er février de la première année au titre de laquelle vous souhaitez bénéficier du régime réel.

Pour vérifier quel régime sera le plus attractif pour votre investissement, vous pouvez faire une simulation gratuite sur le site jedeclaremonmeuble.com. En cas d'option pour le régime réel, ce site très bien conçu vous permet de remplir et de générer votre liasse fiscale de façon simple et sécurisée et de la télétransmettre aux services de impôts, ce qui est désormais obligatoire.

Se constituer un patrimoine exonéré d'impôts

Si vous optez pour le régime réel, dès la première année vous pourrez soustraire de vos recettes locatives : la taxe foncière, les frais de gestion (s'élevant en moyenne à 10 ou 15% du montant du loyer annuel encaissé), les intérêts d'emprunt, 100% des travaux d'entretien et de rénovation réalisés. Par exemple si vous avez 8000 euros de recettes locatives et 24 000 euros de charges déductibles. Vous constatez en année 1, un déficit de - 16 000 euros. Ce solde négatif ne peut être déduit de vos revenus imposables mais il n'est pas perdu pour autant. Vous pouvez le reporter les 10 années suivantes jusqu'à épuisement. Et ce n'est pas tout : vous allez pouvoir ensuite utiliser votre stock d'amortissement pour effacer en totalité les recettes locatives.

Que pouvez-vous amortir ?

Le prix d'achat du bien (hors prix d'acquisition du terrain), soit 85% étalé sur 20 ou 30 ans. "Ce qui représente 2,5 ou 3% du prix d'achat du bien à amortir chaque année", précise Maud Velter. Le mobilier est également amortissable, "soit 10 à 20% par an sur sa durée de vie". Et enfin, les gros travaux (salle-de-bain, électricité, plomberie, agrandissement, reconstruction) sont également amortissables. "Grâce à ce statut de LMNP , vous pouvez être exonéré d'impôts sur votre bien pendant une bonne vingtaine d'années, jusqu'à épuisement des amortissements", confirme Bertrand de Raymond, président de la société Capcime.

Un statut fiscal imbattable

Pour la location nue, si vous avez réalisé d'importants travaux (hors agrandissement et reconstruction), vous pouvez certes faire ce que l'on appelle du déficit foncier. De quoi bien réduire aussi vos recettes locatives mais pendant 10 ans. Pas de les effacer en totalité comme avec le statut de Loueur meublé non professionnel. Vu sous cet angle, difficile de trouver mieux que le LMNP !

La location type AirBnB de plus en plus encadrée

Depuis le 1er janvier 2017, même les revenus tirés de la location meublée occasionnelle relèvent des BIC.
Autre nouveauté de taille : les contribuables qui louent leur logement meublé pour de "courtes durées" et qui en retirent plus de 23000€ par an doivent s'affilier au Régime social des indépendants (RSI). Par exception, les loueurs en meublé peuvent opter pour une affiliation au régime général de la sécurité sociale. En cas d'option, les cotisations et contributions de sécurité sociale dues par ces personnes sont calculées sur une assiette constituée de leurs recettes diminuées d'un abattement de 60 % (87% pour les meublés de tourisme classé).

Enfin, L'Assemblée nationale a voté également le 5 décembre dernier un amendement imposant aux plateformes en ligne du type Airbnb, une déclaration automatique au fisc des revenus de leurs utilisateurs. Cet amendement ne sera applicable qu’à compter de 2019.

Alexandra Boquillon