Crédit immobilier : quelle solution de financement pour les salariés en CDD ?

87 % des embauches se font en Contrat à durée déterminée (CDD). Or, ce type de contrat constitue une réelle barrière à l’accession à la propriété. Seuls 3,5 % des emprunteurs ont pu obtenir un crédit avec un CDD en 2016 chez Vousfinancer. Si tous ces emprunteurs potentiels devenaient finançables, le marché immobilier gagnerait de manière significative en fluidité. Vousfinancer propose alors une piste qui permettrait aux personnes embauchées en CDD de pouvoir emprunter.

Alors que syndicats et patronat se réunissaient le 16 février dernier pour évoquer la taxation des contrats à durées déterminés (CDD) qui représentent à l’heure actuelle près de 90 % des embauches, Vousfinancer, courtier en crédit immobilier constate que ce type de contrat reste le principal frein à l’accès au crédit immobilier et donc à la propriété pour les jeunes. Pour info, « seuls 3,5 % des emprunteurs ont, en effet, obtenu un crédit avec un CDD en 2016 » chez Vousfinancer. Toutefois des solutions pourraient être mises en place afin de faciliter et sécuriser l’accès des jeunes à la propriété, « même avec un CDD » selon Vousfinancer.

Près de 90 % des embauches en CDD

Selon la DARES (Direction de l'Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques) 87 % des embauches ont été faites en CDD en 2015, un chiffre qui n’a pas faibli depuis. « Cette situation constitue deux freins majeurs à l’accès au crédit du point de vue des banques : 70 % des contrats des CDD sont signés sur des durées inférieures à un mois, et seuls 20 % des CDD deviennent des CDI au bout d'un an contre 50 % en 1982 », selon France Stratégie.

Dans ce contexte, on comprend qu'il reste globalement compliqué d’emprunter en CDD… « Par définition un CDD est un contrat qui prendra fin au bout de quelques mois alors que la durée initiale d’un crédit est de 20 ans en moyenne avec une durée de remboursement effective de 7 à 10 ans… Dans ces conditions, il est difficile pour les banques de prêter à long terme en ayant une visibilité à court terme seulement sur la pérennité des revenus qui permettront à l’emprunteur de rembourser sa mensualité » analyse Jérôme Robin, Président de Vousfinancer.

Rares cas d’emprunts en CDD

Emprunter sans CDI, mission impossible? Bien que plusieurs banques soient totalement fermées à ce profil, certaines acceptent d’étudier les dossiers au cas par cas, en fonction du risque, du secteur d’activité, de l’activité des comptes mais également de l’ancienneté dans la banque. Dans l’hôtellerie, la restauration ou la santé par exemple, le CDD est bien souvent la norme… « S’il s’agit d’une personne régulièrement en CDD notamment en lien avec le secteur d’activité dans lequel elle travaille, les revenus du CDD peuvent être pris en compte car considérés comme récurrents. Mieux, si l’emprunteur est en CDD depuis plus de 2 ans et que les comptes sont bien tenus le dossier aura plus de chance d’être accepté. En revanche, un jeune de 25 ans qui vient de décrocher son 1er emploi en CDD devra patienter avant de pouvoir souscrire un crédit. Parfois, il sera plus facile d’obtenir un crédit dans sa propre banque– ou dans celle de ses parents – car on a démontré sa capacité à être un bon client » analyse Sandrine Allonier, Responsable des relations banques chez Vousfinancer.

Par ailleurs, certains CDD sont acceptés plus facilement. C’est le cas des contrats courts de la fonction publique (d’Etat, territoriale, hospitalière y compris les vacataires et contractuels), perçus comme des CDI pour les établissements bancaires. Ils peuvent même bénéficier d’offres spécifiques en termes de garantie ou encore de taux…

Garantir la période transitoire de « non CDI »

« A ce jour, si 45 % des emprunteurs sont des primo-accédants, l’âge du premier achat immobilier n’a pas évolué en 2016, en dépit de la baisse des taux qui a théoriquement resolvabilisé une partie des emprunteurs. Le premier achat immobilier s’effectue ainsi en moyenne à 32 ans, alors que l'âge moyen d'entrée sur le marché du travail est de 23 ans, soit près de 10 ans plus. Ce décalage est notamment lié au fait que 87 % des embauches soient effectuées en CDD. Ainsi chez Vousfinancer seuls 3,5 % des clients ont obtenu un crédit en CDD en 2016, et souvent en étant en couple avec une personne en CDI. Tant que les jeunes n’ont pas décroché un CDI, ils doivent, à raison, rester mobiles et peuvent difficilement se projeter dans l’avenir pour acheter un bien immobilier et se fixer à un endroit donné… Mais cette situation n’est que transitoire puisque qu’au final, 85 % des Français travaillent en CDI. Il faudrait donc trouver le moyen de garantir la période de "non CDI", le temps que la situation professionnelle se stabilise... » analyse Sandrine Allonier.

Une garantie d’Etat ?

Le candidat Sarkozy avant son élimination de la course à la Présidentielle proposait une garantie d’Etat pour rassurer les banques et les inciter à prêter plus facilement aux jeunes.  Sa mesure phare était en effet la mise en place d’une garantie d’Etat face aux banques pour financer l’apport personnel des primo-accédants (environ 10% du montant de la transaction, correspondant aux frais de notaires), « y compris pour les primo-accédants embauchés en CDD », avait-t- il laissé entendre.
Le candidat de droite a été éliminé lors des primaires le 20 novembre dernier. Mais il ne serait pas vain que les autres candidats en lice pour la Présidentielle se penchent aussi sur ce sujet…Une telle mesure constituerait en tout cas un réel coup de pouce pour les primo-accédants de la classe moyenne et permettrait de fluidifier le marché de la pierre. De gauche comme de droite, le prochain gouvernement gagnerait à y réfléchir, car selon l’adage « quand le bâtiment va, tout va ».

Une garantie « spéciale CDD »

Jérôme Robin pour sa part n’attend pas que les politiques veuillent bien se pencher sur la question. Il propose d’ores et déjà l’instauration d’une garantie « spéciale CDD » par un organisme de cautionnement privé.

« Afin de faciliter l’accès à la propriété des jeunes, une solution serait donc de trouver le moyen de garantir la période de « non CDI » sous la même forme qu’une caution, après avoir bien sûr évalué le risque en fonction du profil de l’emprunteur. Cela permettrait, sous conditions, aux jeunes emprunteurs de souscrire une garantie « spéciale CDD » financée par emprunt. Le coût de cette garantie serait dans l’idéal intégré dans le prêt - contrairement aux frais de notaire qui doivent être la plupart du temps financés avec de l’apport - et une partie serait remboursée au moment du passage en CDI, si elle n’a pas été utilisée. « Cette garantie permettrait à la banque d'assurer son rôle de prêteur sans en assumer tous les risques tout en étant rentable pour l'organisme acceptant de la mettre en place », explique Jérôme Robin. Une bonne piste à développer.

Alexandra Boquillon