L'immobilier neuf, victime de son succès ?

La FPI (Fédération des Promoteurs Immobiliers) sabre le champagne, les ventes de logements neufs augmentent de 18 % par rapport au 3e trimestre de l'année dernière. Mais ils le boivent du bout des lèvres, regrettant une offre insuffisante pour satisfaire une demande toujours plus importante. Comme on l'observe depuis le début de l'année, les investisseurs tirent le marché de la construction vers le haut, notamment grâce au dispositif Pinel. Les primo accédants reviennent timidement, même s'ils restent minoritaires. Et justement cet engouement pour le logement neuf fait que l'augmentation de +10,2 % de l'offre ne suffit pas.

Les ventes de logements neufs bondissent, mais…

Au 3e trimestre les promoteurs ont vendu 25 247 logements neufs, ce qui est mieux que les 21 390 unités cédées au 3e trimestre 2014. Mais c'est également bien moins que les 30 764 habitations vendues au 2e trimestre, et toujours moins bien que les 26 745 unités du 1er trimestre. En clair, les affaires ont été moins bonnes au 3e trimestre, et pourtant globalement les chiffres sont globalement encourageant.

Car en fait le nombre d'habitations neuves vendues au cours des 9 premiers mois de 2015 est +28,7 % supérieur aux performances de la même période en 2014. Et tout cela avec une baisse considérable de -15,5 % des logements vendus en bloc. C'est donc une bonne nouvelle pour le bâtiment : les particuliers s'intéressent davantage à l'immobilier neuf.

En revanche le marché semble s'intéresser de moins en moins aux résidences de services meublées. Les ventes diminuent de -3,3 % depuis le début de l'année, contre performance que les promoteurs attribuent au « spectre de la fin du dispositif Censi-Bouvard à la fin de l'année 2016 ».

Une position assez difficile à partager, car tout investissement immobilier locatif effectué avant cette date continuera de bénéficier des avantages fiscaux.

L'investissement locatif reste le champion de l'immobilier neuf

Il y a un fossé entre les accédants à la propriété et les investisseurs. Les premiers sont des familles dont les parents sont de moins en moins jeunes, qui doivent épargner de plus en plus jusqu'à ce qu'ils réunissent l'apport personnel. Les seconds ont plus de 50 ans, selon une étude du Crédit Foncier ils gagnent 67 000 € par an, ce qui ne les placent pas parmi la catégorie des CS+.

Seulement ils ont pu acheter leur résidence principale à une époque où les prix étaient plus abordables. Aujourd'hui ils reviennent en masse sur le marché de la construction, soutenant les ventes de logements neufs à eux seuls. Au 3e trimestre ils ont acheté 10 906 logements neufs, représentant ainsi 54 % des ventes, contre 50 % au 1er trimestre.

Les accédant pesaient pour 50 % des ventes au 1er trimestre, de juillet à août ils n'ont acheté que 9140 unités, et représentent désormais 46 % du marché.

De janvier à septembre les ventes à investisseurs ont bondi de +62,8 %, tandis que celles aux accédants n'ont augmenté « que » de +4,9 %. Une fois de plus les promoteurs applaudissent le dispositif Pinel, qui « permet d'effacer les effets des années précédentes et de s'approcher progressivement des niveaux de 2011 ».

Prix : l'écart se creuse entre Paris et la province

D'après la fédération des promoteurs, les prix restent relativement stables en n'augmentant que de +0,5 % en 1 trimestre. Toutefois lorsque l'on se penche plus près de ces chiffres, on s'aperçoit du grand écart qu'il existe entre la région parisienne et la province.

En Île-de-France il faut aujourd'hui compter sur un budget de 4868 €/m², contre 3628 €/m² dans les régions. Dans la couronne francilienne les prix des logements collectifs neufs ont grossi de +4,4 % au 3e trimestre, par rapport à la même période l'année précédente.

En revanche en région il se stabilise à -0,1 %, une grande différence dans un budget. On regrette de ne pas bénéficier de plus de précisions sur la différence de prix entre Paris, sa petite et sa grande couronne. L'immobilier neuf dans la capitale est inaccessible au ménage moyen, tandis que les municipalités des zones tendues font des efforts pour libérer du foncier à bas prix.

Au 2e trimestre 2015, le ministère du logement constatait que les appartements se vendaient à 4811 €/m² en Île-de-France, contre 2974 €/m² en Franche-Comté. Dans des régions hébergeant des métropoles denses en habitants comme les Pays de la Loire avec Nantes Métropole, les appartements neufs se vendent à 3505 €/m².

Bientôt une pénurie de logements neufs ?

Les municipalités accordent davantage de permis de construire, mais le taux d'échec reste élevé. En conséquence les départs de chantier restent en baisse de -1,2 % sur 1 an, encore qu'ils augmentent de +1,2 % dans le collectif. Mais avec l'inquiétude des Français pour leur retraite, ajoutée au ras-le-bol fiscal, l'intérêt des ménages pour l'investissement locatif dans un appartement neuf grandit.

Ajoutons à cela le succès du PTZ+ 2015, qui va effectivement atteindre son objectif de 70 000 dossiers.Que dire alors de l'objectif de 120 000 prêts à taux zéro annoncé par la ministre du logement Mme Sylvia Pinel ? Car les plafonds de revenus vont être rehaussés, et la participation pourra être portée jusqu'à 40 %. L'intérêt va donc encore grandir chez les primo accédants, qui préfèrent généralement le confort et les économies énergétiques des programmes neufs aux travaux de rénovation dans l'ancien.

Mais alors qu'ils devraient s'en réjouir, les promoteurs s'interrogent.

Car l'offre commerciale de logements neufs n'augmente que trop lentement. Au 3e trimestre 2015 les 92 725 habitations disponibles à la vente, sont inférieures aux 93 857 unités du 2e trimestre 2014. La différence ne serait pas bien grave, n'eut été le nombre de mois théoriques de vente.

Car si il fallait 15,2 mois pour vendre tout le stock disponible au 3e trimestre 2014, les estimations descendent à 11,8 mois au 3e trimestre 2015. Les logements neufs se vendent plus rapidement, car l'engouement du public grandit. Les aides de l'État n'y sont certainement pas étrangères, et la faiblesse des taux d'emprunt immobilier ajoute du pouvoir d'achat aux ménages.

Portrait de celui qui achète de l'immobilier neuf au 3e trimestre

Dans l'ensemble, les revenus annuels moyens de l'emprunteur s'établissent à 60 800 €, dont 55 000 € dans l'accession. C'est ce que rapporte l'observatoire CSA/Crédit Logement, dans son édition du 3e trimestre.

Le coût moyen d'une opération est de 241 200 €, pour laquelle les ménages empruntent 195 500 €. Ils disposent d'un apport personnel moyen de 19 % du montant de l'opération, et choisissent de rembourser sur 230 mensualités. Le revenu sont stables par rapport à ce de leurs leurs prédécesseurs de 2014, mais grâce à des taux bancaires plus avantageux ils empruntent davantage. Ils en profitent d'ailleurs pour rembourser sur une plus longue durée, et utilisent moins d'apport personnel.