Immobilier parisien : coup de frein sur la primo-accession à cause des tarifs prohibitifs !

Malgré les taux de crédit au ras des pâquerettes, l’envolée des prix de la pierre dans la capitale contraint bon nombre de Parisiens à prospecter en Première et Deuxième Couronne. Qui peut encore s'acheter un appartement dans Paris intra-muros ? Combien doivent-ils gagner pour prétendre s’offrir un 75 m2 ? Analyse croisée de Vousfinancer et des notaires du Grand Paris.

Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel. Sauf à Paris ? En tout cas, les prix de la pierre parisienne ne cessent de grimper et atteignent aujourd’hui des sommets. De quoi bien freiner les projets des primo-accédants parisiens. En effet, il faut gagner un salaire de ministre pour pouvoir s’offrir un petit 75 m² dans Paris intra-muros. Selon les calculs de Vousfinancer, Il faut précisément gagner 11 002 € nets par mois pour acheter cette superficie. Alors que les taux de crédit atteignent mois après mois des niveaux plancher, les prix dans Paris atteignent à l’inverse des sommets. En effet, d’après les notaires parisiens ils ont franchi à la rentrée la barre symbolique de 10 000 € le m2 comme annoncé en juillet dernier. Ainsi le prix du mètre carré s’établissait à 10 000 € en moyenne en août et devrait s’établir à 10 280 € en octobre ! Depuis 2009, les prix ont ainsi augmenté de 4 000 €/m2 en moyenne, une envolée que n’a pas compensée la baisse des taux, malgré leur division par trois en une décennie.

8220 euros/m2 dans le 19ème arrondissement et 13 920 euros/m2 dans le 6ème

A noter que « désormais, seuls les 19e, 20e et 13e arrondissements affichent des prix inférieurs à 9 000 €/m². Plus de la moitié des arrondissements (11 sur 20) dépassent 10 000 € le m², huit sont à plus de 11 000 € le m² et cinq sont carrément au-dessus de 12 000 € le m² », soulignent les notaires dans leur dernière note de conjoncture. Ainsi le prix au m2 dans les 1er, 3ème, 4ème, 6ème et 7ème dépassent 12 000 euros. Sans surprise, en première place du podium, le chic arrondissement du 6ème (Saint-Germain/Odéon) se distingue avec un prix moyen au mètre carré qui culmine à 13 920 euros (+10% en un an selon les notaires du Grand Paris). Pour information, dans le 5ème arrondissement le prix au mètre carré moyen atteint actuellement 11 940 euros.

Combien faut-il gagner pour pouvoir s’acheter 75 m² à Paris ?

Pour rappel, en 2009, le prix du mètre carré moyen dans la capitale s’établissait à 6020 euros mais les taux de crédit plafonnaient à l’époque à 4,30 % (sur 20 ans, hors assurance), contre 10 280 euros à l’heure actuelle avec des taux au plus bas : 1,35% !  Pour une mensualité de 1000 euros remboursés chaque mois à la banque, les Parisiens pouvaient acquérir 26,7 m2. Alors qu’aujourd‘hui avec la même mensualité de crédit, ils ne peuvent prétendre qu’à 20,5 m2, à raison de 10 280 euros du mètre carré selon l’étude comparative réalisée par Vousfinancer, et ce malgré des taux au plancher. La mensualité sur 20 ans pour l’achat d’un 50 mètres carrés s’élevait il y a 10 ans à 1872 euros, aujourd’hui il faut ajouter 573 euros supplémentaires, soit une mensualité de 2445 euros par mois. Pour pouvoir s’offrir un 50 m2, il fallait gagner en 2009, 5166 euros par mois, contre 7335 €/ mois à l’heure actuelle. Pire, pour prétendre s’offrir 75 m2 (même pas 100 m2 !), les revenus nets nécessaires s’élèvent à 11 002 € par mois (au lieu de 8424 €/mois 10 ans en arrière).

Première et Deuxième Couronne : fabuleux marché de report pour les Parisiens

« Du délire » ! pour les observateurs du marché immobilier. Les prix prohibitifs pratiqués dans la capitale obligent de plus en plus de Parisiens à prospecter en Première ou Deuxième Couronne, et pas uniquement les primo-accédants les plus modestes ! «Pour acheter à Paris, il faut être deux CSP+ (catégories socioprofessionnelles les plus favorisées) en couple», analyse Me Thierry Delesalle, porte-parole de la Chambre des notaires du Grand Paris, dans un article du Figaro, publié hier. Les ménages moins aisés doivent, quant à eux, migrer vers la Petite et Grande Couronne. « La Grande Couronne attire car de plus en plus de logements se construisent », précise l’officier ministériel. Conséquence : le marché est dynamique en Première et Deuxième Couronne et les prix augmentent !

Neuilly-sur-Seine : première commune à avoir franchi le cap des 10 000 € le m² au 1er trimestre 2019

D’après les indicateurs avancés sur les avant-contrats des notaires du Grand Paris, les prix pourraient augmenter de près de 5% d’octobre 2018 à octobre 2019 et approcher 5 000 € le m² sur l’ensemble de la Petite Couronne. Selon les notaires franciliens, une tendance haussière des prix des appartements est constatée pour une très grande majorité des communes significatives de Petite Couronne. D’ailleurs Neuilly-sur-Seine est la première commune à avoir franchi le cap des 10 000 € le m² au 1er trimestre 2019. Levallois-Perret arrive en seconde position avec un prix approchant 9 000 € le m² au 2e trimestre 2019.

Marché stagnant à Paris mais très dynamique en Première et Deuxième Couronne

Le marché des appartements en Grande Couronne est le plus actif de la région. Excepté dans le Val-d’Oise, les volumes de ventes ont fortement progressé, comparés au 2e trimestre 2018 et à 1999-2007. Avec 10 320 transactions, la Grande Couronne dépasse Paris (9 490 transactions). A noter qu’il faut compter 3 000 €/m² pour acquérir un appartement en Grande Couronne. A l’inverse, le marché des appartements parisiens reste le moins dynamique de la région, observent les notaires.

Les taux plancher ne compensent pas les prix au sommet à Paris (10 280 €/m2)

Les notaires l’avaient annoncé en juillet : la barre symbolique des 10 000 € serait franchie en septembre…Cela a finalement été chose faite dès le mois d’aout à 10 000 € en moyenne et on atteindra 10 280 € en octobre selon les projections des notaires. Dans un contexte de taux plancher, les prix poursuivent leur ascension fulgurante : + 7,8 % sur un an et 70 % sur dix ans, par rapport au point bas de 2009, où les prix à Paris étaient descendus à 6 020 €/m2 . A cette période-là, les taux de crédit étaient à plus de 4 % sur 20 ans…Depuis, même s’ils ont été divisés par 3, l’envolée des prix à Paris n’est plus compensée par la baisse des taux, et le pouvoir d’achat immobilier diminue depuis 2016… « En termes de pouvoir d’achat immobilier, entre 2012 et 2017 la hausse des prix à Paris était compensée par le niveau des taux. Mais ce n’est plus le cas depuis que les prix ont passé le seuil symbolique des 9 000 € le m2 début 2018. A plus de 10 000 €, on ne peut plus acheter que 20,5 m2 avec des taux moyens à 1,35 % sur 20 ans, contre 24 m2 en 2016, avec des taux pourtant supérieurs de 1 point à 2,45 % sur 20 ans » analyse Sandrine Allonier, porte-parole de Vousfinancer.

Envolée des prix, taux au ras des pâquerettes et marché parisien totalement décorrélé des revenus des acquéreurs potentiels !

Avec une telle envolée des prix, le marché parisien devient totalement décorrélé des revenus dont l’augmentation ne suit pas celle des prix ! Inévitablement, les revenus nécessaires pour acheter à Paris ne cessent d’augmenter depuis 2016 : Actuellement pour acheter un appartement de 50 m2 à Paris, financé à 100 % via un emprunt sur 20 ans (avec 10 % d’apport pour financer les frais), il faut gagner au minimum 7300 € nets par mois, et 11 000 € à deux si on veut acheter 75 m2 pour y loger sa famille avec 2 enfants (pour rembourser un emprunt de 771 000 € avec des mensualités de 3 667 € sur 20 ans) !

Salaires très élevés, gros apports et allongement des durées de prêt

Des salaires très élevés, observe Vousfinancer ! On note ainsi que les primo-accédants ne représentent que 30 % des acheteurs (contre 43 % en moyenne en France), et qu’ils achètent nécessairement avec un apport très élevés (80 000 €) et ce afin d’acheter une surface assez grande pour y vivre. Du côté des durées de prêt, on constate le même mouvement d’allongement des durées de prêt (22 ans et 8 mois en moyenne, soit une hausse de 14 mois sur un an à Paris) que dans le reste de la France, témoignant de la volonté des banques de compenser la hausse des prix… mais jusqu’à quand ?

L’hécatombe : seulement 28% de primo-accédants à Paris en 2019 contre 40% en 2018 !

« Même dans un contexte de taux très attractifs, il y a un véritable risque de sortie du marché de certaines typologies d’acheteurs à Paris comme les ménages modestes ou les primo-accédants qui n’ont plus la possibilité d’acheter la surface dont ils auraient besoin. On note ainsi cette année un décrochage des primo-accédants à Paris dont la part est tombée à seulement 28 % des acheteurs en 2019 contre 40 % en 2018. A l’inverse, la part des investisseurs augmentent : ceux qui ne peuvent pas acheter une surface suffisante dans laquelle vivre font le choix de rester locataires de leur résidence principale mais d’acheter pour louer » analyse Sandrine Allonier. Parmi les emprunteurs parisiens par exemple, la part des achats pour des investissements est 2 fois supérieure (30 % des emprunteurs achètent pour louer) à ce qu'elle est au niveau national (15 %). L’achat de la résidence principale ne concerne que 68 % des emprunteurs parisiens contre 80 % en moyenne France entière. Un phénomène qu’on commence à percevoir aussi dans les grandes villes où les prix sont les plus élevés, comme Lyon et Bordeaux…

Alexandra Boquillon

Sources : Vousfinancer et les notaires du Grand Paris