Vers une épilogue de la crise des subprimes ?

Après Bank of America, c'est autour de la très puissante Goldman Sachs de lever le drapeau blanc. La banque d'affaires américaine a accepté de racheter pour 3,15 milliards de dollars de mauvais crédits immobiliers à Freddie Mac et Fannie Mae. Il ne reste donc plus que 3 dossiers en cours pour la FHFA (Federal Housing Finance Agency), et le dossier de la crise des subprimes pourrait enfin être bouclé.

Des amendes records pour de mauvais prêts immobiliers

17 milliards de dollars pour Bank Of America

Bank of America est le plus gros poisson attrapé par la FHFA. De guerre lasse, et surtout afin d'éviter d'avoir à payer davantage, sur le plan financier tant sur le plan de son image auprès du public, Bank Of America a annoncé jeudi 21 août accepter de payer 16,65 milliards de dollars aux autorités américaines.

Selon le site LeMonde.fr, l'amende pour avoir menti au marché se monte à 9,65 milliards de dollars, les 7 milliards de dollars restants iront servir à compenser les consommateurs. Une part servira à renégocier des prêts immobiliers, une autre part sera destinée à construire des logements abordables. Une nouvelle qui permettra sans doute de redonner au public sa confiance envers le monde de la finance.

Car la confiance envers Bank Of America, et au travers d'elle envers tout le système financier, était bien mal en point. L'année dernière, le département de la justice américaine l'avait accusé d'avoir menti aux investisseurs. Un groupe de travail créé par le président M. Barak Obama, a enquêté sur les pratiques frauduleuses ayant provoqué l'arrivée de la crise des subprimes.

Ce groupe de travail s'est aperçu que Bank of America avait structuré des ensembles de prêts hypothécaires à risques, pour les vendre à des investisseurs en les présentant comme des prêts sûrs.Toutes ces pratiques ont amené Bank Of America à battre record sur record. Après une facture de 50 milliards de dollars à l'attention des investisseurs lésés et des autorités américaines, c'est un accord de 9,5 milliards de dollars que la banque avait dû octroyer à la FHFA.

3,5 milliards de dollars pour Goldman Sachs

Le géant mondial Goldman Sachs a fini lui aussi par hisser le drapeau blanc. La célèbre banque d'affaires américaine a annoncé qu'elle allait racheter des produits financiers contenant de mauvais crédits immobiliers, pour un montant de 3,15 milliards de dollars. Il s'agit donc de reprendre ce que Goldman Sachs avait vendu aux sociétés de refinancement Freddie Mac et Fannie Mae, entre 2005 et 2007.

C'est donc la banque d'affaire américaine qui reprend en main la responsabilité de ces créances douteuses. Freddie Mac récupéra 1 milliard de dollars, et Fannie Mae 2,15 milliards de dollars. Dans un communiqué, Goldman Sachs précise que cet accord permet de régler « toutes les plaintes déposées par la FHFA au niveau fédéral comme au niveau des états ».

Prudents lorsqu'il s'agit de leurs propres fonds, à défaut de l'être lorsqu'il s'agit de ceux des autres, les dirigeants de la banque avaient déjà constitué des réserves.

1,25 milliards de dollars pour Morgan Stanley

En février, la banque Morgan Stanley annonçait qu'elle allait mettre la main à la poche pour en ressortir 1,25 milliards de dollars. Ultime pénalité, après avoir versé 5,1 milliard de dollars à la FHFA. Cependant les ennuis de Morgan Stanley ne sont peut-être pas terminés, car le régulateur des caisses d'épargne l'accuse d'avoir vendu des produits dérivés, liés aux subprimes.

Sur le volet des prêts immobiliers à risques revendus aux désormais célèbres Fannie Mae et Freddie Mac, la banque d'affaires américaines a maintenant tourné la page.

 

L'histoire des mauvais crédits immobiliers

Les prêts immobiliers risqués des années 80

Dans les années 80, les États-Unis vantaient l'American Way of Life. Les classes moyennes elles aussi pouvaient habiter dans de grandes maisons avec de grandes cuisines, et acheter de grosses voitures grâce au crédit. Oui mais voilà, endetter les ménages plus que de raison présente un risque. Surtout lorsque l'on réalise que les prêts immobiliers aux États-Unis sont à taux variable, et peu indexés.

Conscientes de ce risque, les banques ont alors eu l'idée d'avoir recours à la titrisation des crédits.

Les CDO, ou comment se débarrasser du risque

Les banques eurent une idée lumineuse pour se débarrasser de leurs créances immobilières à risques. Elles créèrent des fonds appelés CDO (Collaterized Debt Obligations), qui regroupaient toutes sortes de prêts accordés à des personnes physiques et morales n'ayant pas forcément les moyens de les rembourser jusqu'au terme. C'est ainsi que les CDO pouvait regrouper des dettes immobilières, professionnelles et/ou étudiantes.

L'idée aurait pu être bonne, si elle avait servi à amortir la prise de risque afin de repartir d'un bon pied. Mais l'idée était tellement bonne que les banques s'en servirent pour dissimuler encore plus de prêts à risques.

Quand les CDO deviennent complètement incontrôlable

L'économiste Paul Jorion, cité par Le Monde.fr, nous apprend que l'encours des CDO représentait entre 600 et 700 milliards de dollars en 1996. Le lecteur aura tout de suite noté cette précision à 100 milliards de dollars près, qui démontre parfaitement l'aspect opaque du dispositif.

Car les CDO permirent de tellement bien fabriquer des créances immobilières douteuses pour les revendre à des investisseurs et s'en laver les mains, que les banques déclinèrent le système sous différentes formes. On finit donc par trouver sur le marché des CDO qui incluaient eux-mêmes plusieurs CDO, certains incluant déjà d'autres CDO. Au final, ces fonds titrisés n'étaient plus qu'un ensemble d'un nombre incalculable de mauvais crédits, absolument impossibles à évaluer avec précision. Même les agences de notation s'y laissèrent prendre.

Plus que 3 procédures pour la FHFA

Depuis l'explosion du système des CDO et l’arrivée de la crise économique mondiale qui s'ensuivit, la FHFA n'a pas chômé. En 2012, elle épingle JP Morgan Chase, Citigroup, Wells Fargo, Bank of America et Ally Financial pour 25 milliards de dollars. Un an plus tard JP Morgan Chase devra remettre la main à la poche (13 milliards de dollars).

Il ne reste plus aujourd'hui que 3 procédures en cours, contre HSBC et Royal Bank of Scotland, ainsi que contre une banque japonaise : Nomura. Une fois la dernière de ces 3 banques obligée de faire profil bas, le dernier retour de bâton de la crise des subprimes aura peut-être été donné.