Les taux d’intérêt baissent toujours… mais pour qui ?

Les taux d’intérêt immobilier continuent à baisser, poursuivant une bonne lancée initiée en 2015. Un avantage qui encourage les velléités d’achat en 2016, surtout en concordance avec une relative baisse des prix l’année dernière et le prolongement des mesures gouvernementales d’aide à l’accès à la propriété. Les taux baissent, oui, mais pour autant, tout le monde ne peut pas en profiter : bon moment pour acheter ou pas, les candidats à l’acquisition doivent néanmoins justifier d’un dossier solide auprès des banques.

Les taux se resserrent

Les taux d’intérêt immobilier ressemblent à un blockbuster hollywoodien, type Star Wars : ils enquillent les records, mois après mois. Après avoir défrayé la chronique tout au long de 2015, ils se sont stabilisés en fin d’année avant de repartir à la baisse début 2016, pour se rapprocher des niveaux de juin dernier. Vers de nouveaux records ?

Comme on peut le constater sur cette page, il est désormais possible d’emprunter :

  • Jusqu’à 1,5 % sur 15 ans
  • Jusqu’à 1,8 % sur 20 ans

Les taux moyens sont un peu plus élevés. Dans l’ancien, le taux moyen est de 2,08 % ; dans le neuf, de 2,19 %, selon l’Observatoire Crédit Logement. Quant à la durée moyenne d’emprunt, elle s’établit à 211 mois (soit 17 ans ½) en février.

Ça, c’est en théorie. En pratique, certains acheteurs ont pu profiter de taux encore plus avantageux, autour de 1,5 % sur 20 ans ; en mai 2015, les mêmes (c’est-à-dire des profils excellents) pouvaient obtenir un taux de 1,64 %, soit une baisse moyenne de 0,15 %. Des chiffres qui ont de quoi faire tourner la tête, surtout pour les acquéreurs qui ont difficilement obtenu des taux à 3,5 % ou 4 % il y a encore quelques années, et qui sont désormais prêts à tout pour renégocier leur crédit immobilier. À juste titre.

Beaucoup d’appelés, mais peu d’élus

Sauf que tout le monde ne peut pas prétendre à des taux si avantageux. Seuls les meilleurs candidats sont concernés, ceux qui peuvent présenter des dossiers solides répondant aux exigences des banques qui, elles, n’ont pas baissé leur garde à mesure que les taux chutaient. Beaucoup d’acquéreurs potentiels se sentent appelés, mais ne sont élus que les meilleurs profils : salaires élevés, contrat en CDI, et apport minimum d’au moins 10 %.

Par ailleurs, ce ne sont pas seulement les taux qui favorisent les meilleurs profils, mais l’inverse aussi : les meilleurs profils participent à la baisse des taux. Pourquoi ? Il faut aller voir du côté des banques. En situation de forte concurrence, le secteur bancaire voit chacun de ses représentants tenter de tirer la couverture à lui. Les banques veulent fidéliser leurs meilleurs clients, ceux qui disposent des revenus les plus confortables et, conséquemment, d’un fort potentiel d’épargne. Pour ce faire, ils proposent des tarifs toujours plus intéressants, produits sur-mesure pour cette clientèle. Et favorisent ainsi la baisse continuelle des taux.

Le bon côté des choses, c’est que l’acquéreur potentiel, s’il dispose d’un bon dossier, peut faire jouer la concurrence et négocier un taux plus avantageux que la moyenne.

Malgré tout, les taux bas profitent à de nombreux profils

Heureusement, cet élitisme du taux d’intérêt ne concerne que les chiffres les plus bas : pour un bon dossier, 1,8 % sur 20 ans, c’est un taux à ne pas négliger. Les candidats à l’accession à la propriété ne s’y sont d’ailleurs pas trompés, qui comptent bien profiter de la bonne situation du marché immobilier en 2015 pour placer leurs billes dans la pierre en 2016, ou tout simplement pour revenir sur les crédits qu’ils ont signé quand les taux tutoyaient les sommets.

De la place pour les primo-accédants

Alors, oui, ce sont les meilleurs profils qui sont chouchoutés par les banques. Mais les primo-accédants ne sont pas en reste, et les banques lorgnent également de leur côté : après tout, ce sont de potentiels nouveaux clients, qui ouvrent des perspectives à long terme. En outre, la prolongation des aides gouvernementales pour l’accès à la propriété tend à faciliter les transactions – une volonté de l’État de favoriser le logement des jeunes en 2016 par tous les moyens.

Le renforcement du prêt à taux zéro, plus souple et plus généreux, va dans ce sens :

  • Financement jusqu’à 40 % de la somme totale d’achat ;
  • Extension à l’immobilier ancien, sous conditions ;
  • Possibilité de différer le début du remboursement du crédit ;
  • Une durée de prêt rallongée jusqu’à 20 ans.

L’allongement de la durée des prêts contribue également à favoriser les primo-accédants. Plus de la moitié des crédits immobiliers (55,2 %, contre 44,5 % il y a deux ans) s’étendent sur 20 ans, et plus de 20 % d’entre eux sur plus de 25 ans (contre 14,4 % l’année dernière).

Une bonne occasion de renégocier

Les taux bas sont également une bonne opportunité, pour ceux qui bénéficient déjà d’un crédit immobilier, de renégocier leur prêt sur de nouvelles bases. Rappelons-nous qu’il n’y a pas si longtemps, en 2014, le taux d’emprunt moyen était monté à 3,3 %. Il serait donc dommage de ne pas en profiter.

Néanmoins, à ce petit jeu, les banques ne se laissent pas faire, et il est plutôt commun pour elles de refuser une renégociation du taux ; les intérêts, après tout, représentent leur rémunération. Une fois de plus, seuls les meilleurs profils, que les établissements bancaires désirent conserver à tout prix, seront favorisés dans cette démarche. Pour les autres, il existe une autre opportunité : aller voir ailleurs.

Face à une banque qui clôt toute négociation, la meilleure (mais coûteuse) solution consiste à ouvrir des pourparlers avec un autre établissement de prêt. Celui-ci rachète le premier crédit et moyennant finance (pénalités de remboursement anticipé auprès de la banque + frais d’ouverture de dossier auprès du nouvel établissement), l’acquéreur peut obtenir un taux beaucoup plus bas. Cette opération n’est toutefois intéressante que sous certaines conditions :

  • Le nouveau taux négocié doit être inférieur d’au moins 1 point au taux d’origine ;
  • Le montant total du crédit doit dépasser 50 000 € ;
  • La durée restante de remboursement doit être supérieure à la durée écoulée.

Le mieux étant encore de confier son projet à un courtier et de le laisser trouver le meilleur taux aux conditions les plus avantageuses.

De bonnes perspectives à venir

Tous les experts s’accordent à dire que ces taux devraient poursuivre leur baisse au moins jusqu’à l’été 2016, voire au-delà. Il y a, à cela, au moins trois raisons :

  • La continuation de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, très accommodante, contribuant à écraser les taux d’intérêt ;
  • La baisse du taux d’emprunt de la France à 10 ans (l’OAT), référence des taux fixes pour les crédits immobiliers ;
  • Les banques qui vont continuer de draguer leurs meilleurs profils et les primo-accédants.

Dans un marché cyclique comme celui de l’immobilier, la meilleure période est le printemps : c’est là, entre mars et juin, qu’est signé le plus grand nombre de transactions. Il faudra donc bien surveiller les chiffres au mois de juin prochain pour savoir si la bonne santé du marché immobilier, initiée l’année passée, se confirme en 2016.