Résiliation annuelle de l’assurance de prêt : quel impact pour les emprunteurs ?

Bonne nouvelle pour les emprunteurs ! Enfin, une bonne nouvelle à court terme, avec en prime, un risque de remontée des taux de crédit à moyen terme…Mais le coût total du crédit va-t-il augmenter pour autant?  Quel sera au final l’impact de cette nouvelle mesure pour les emprunteurs ? Analyse de Jérôme Robin, président-fondateur de VousFinancer.

A compter du 1 er mars prochain, il sera finalement et enfin possible de résilier votre assurance de prêt tous les ans, à date anniversaire, pour les nouveaux crédits souscrits à partir du mois de mars. Seule condition : que les garanties de l’assurance individuelle soient équivalentes à celles du contrat groupe, proposé par la banque. Par contre, la mesure s’appliquera seulement à compter du 1er janvier 2018 pour tous les autres crédits souscrits avant mars 2017. Il faudra donc patienter quelques mois encore pour les anciens crédits…

En tout cas, ce n’était pas gagné, loin de là ! En effet, après moult rebondissements, la mesure a été adoptée de nouveau le 17 janvier à l’unanimité par un vote de la commission mixte paritaire (Amendement Bourquin). Pour rappel, fin septembre 2016, l'Assemblée nationale avait déjà adopté un amendement prévoyant le droit à la substitution annuelle de l'assurance emprunteur, dans le cadre de la loi Sapin 2. Mais il avait été retoqué en décembre par le Conseil constitutionnel. Elle a finalement été définitivement adoptée le 8 février par le Sénat, après le vote le 26 janvier de l'Assemblée nationale.

Davantage de concurrence et une offre plus diversifiée

Alors que le Sénat vient donc d’adopter définitivement le principe de la résiliation annuelle de l’assurance emprunteur, Vousfinancer, réseau de 150 agences de courtage en crédit s’interroge sur l’impact d’une telle mesure. Va-t-elle faire remonter les taux de crédit ? Et surtout, va-t-elle au final augmenter le coût du crédit ?  « A court terme c’est une très bonne nouvelle car cela va introduire davantage de concurrence sur le marché de l’assurance emprunteur détenu à 85 % par les banques via la souscription de leur assurance groupe. L’offre devrait être plus diversifiée, avec des tarifs en baisse et de meilleures garanties afin d’être plus attractive pour diminuer la probabilité de résiliation… », analyse Jérôme Robin, président et fondateur de Vousfinancer.

Facteur déclenchant de la remontée des taux de crédit

Mais « à moyen terme, le fait que le stock puisse être également résilié risque de peser sur la rentabilité des banques. En effet, les emprunteurs concernés seront essentiellement ceux qui ont souscrit un crédit récemment, donc à des taux très bas tels que nous les connaissons depuis 4 ans, et sur lesquels les marges des banques pourraient devenir négatives a posteriori une fois l’assurance résiliée… Dans ce contexte, il est certain que les banques devront trouver le moyen de compenser le manque à gagner, ce qui pourrait contribuer à une remontée plus forte des taux de crédit alors même que depuis fin 2016, elles contiennent les hausses en ne répercutant que faiblement l’envolée des taux d’emprunt d’Etat… » anticipe Jérôme Robin, président et fondateur de Vousfinancer.

Fin du quasi-monopole des banques

Cette mesure met fin en tout cas au quasi-monopole des banques. Attention à ne pas souscrire pour autant une assurance attractive en termes de tarif mais qui vous couvrirait mal en cas de sinistre. Même si théoriquement la banque exigera que votre nouvelle assurance offre les mêmes garanties que le contrat groupe, soyez tout de même très vigilant sur les garanties proposées par certains assureurs. D’ailleurs, «si certains contrats sont plus chers, c’est parce que les garanties et les exclusions sont meilleures », témoigne Karine Foltynski, courtier en assurances pour NousAssurons.com et courtier en prêts. « Ainsi sur certains contrats, les sports de loisir comme la pratique du jet ski en été peuvent être couverts. A l’inverse quand on ne paye pas cher, il y a beaucoup de garanties qui sont exclues et on s’aperçoit au moment de la réalisation du sinistre qu’on n’était pas bien assuré. Dans la majorité des contrats, le saut à l’élastique est également une exclusion », met-elle en garde.

A quoi sert l’assurance emprunteur ?

Payer une assurance de prêt au rabais, c’est tentant mais au final ce n’est pas un bon calcul. C’est même une erreur magistrale ! Car en cas de sinistre, si vous vous tuez en saut à l’élastique par exemple et que ce sport ludique est exclu de votre contrat d’assurance, le conjoint devra continuer à payer chaque mois les mensualités du crédit. A l’inverse si cette garantie est incluse dans votre contrat d’assurances, en cas de décès, l’assurance prend en charge les mensualités de crédit. Ce qui change tout ! Pour info, l’assurance-emprunteur couvre les remboursements d'un prêt immobilier en cas de décès de l’un des conjoints, d'invalidité ou d'incapacité temporaire de travail.

Jusqu’à présent les contrats groupe, ceux proposés par les banques étaient en général plus chers, et offraient de bonnes garanties. Les cartes sont désormais rebattues avec l’amendement Bourquin ! Si les banques vont devoir baisser leurs tarifs, certains assureurs « bon marché » vont, pour leur part, devoir proposer de meilleures garanties, concurrence oblige.

La vraie bonne nouvelle : coût total du crédit identique au final

Cette mesure tant attendue par les emprunteurs et les assureurs individuels, tant décriée par le secteur bancaire dans son ensemble pourrait bien être le facteur déclenchant d’une remontée de taux plus importante que prévue. Selon Jérôme Robin, pour équilibrer leurs comptes de résultat, les banques à un moment donné n’auront, en effet, pas d’autre choix que de remonter leurs taux de crédit afin de compenser le manque à gagner, sur les taux d’assurances, "ce qui est normal". Mais le coût total du crédit va-t-il être pour autant plus lourd à porter pour l’emprunteur ? « Si l’emprunteur économise sur l’assurance de prêt mais paye plus cher son taux d’intérêt, il devrait s'y retrouver», conclut Jérôme Robin. Au final pour l’emprunteur, ça devrait donc revenir au même.

Alexandra Boquillon