La difficile ascension du marché de l'immobilier

Après le report de l'édition prévue en avril, le salon de l'immobilier qui devait se tenir du 18 au 20 septembre est purement et simplement annulé. Les organisateurs se justifient par l'absence de primo accédants, « 2e étage de la fusée » indispensable à la reprise du marché. Les bons résultats annoncés par la FPI (Fédération des Promoteurs Immobiliers) ne concernaient que les investisseurs, il reste désormais à motiver la résidence. Les taux d'emprunt restent un argument aujourd'hui, mais cela ne suffit pas à redonner confiance aux jeunes ménages.

La France, ce pays de propriétaires non accédants

Les Français et l'immobilier, c'est une longue histoire d'amour. Particulièrement en ces temps économiquement difficiles où les jeunes ménages aimeraient bien devenir propriétaire de leur résidence principale. Mais si d'après l'INSEE 57,8 % des ménages possèdent leur logement, seuls 18 % d'entre eux sont encore accédants. Une majorité de 39,7 % en a terminé avec les remboursements de leur prêt immobilier, on les appelle les propriétaires non-accédants.

Si les chiffres de l'institut ne donnent pas leur tranche d'âge, on peut raisonnablement tabler sur le fait qu'ils ont plus de 45 ans. Ainsi la minorité de jeunes ménages n'arrivent pas à acheter leur logement, il y aurait aujourd'hui 5 millions de résidences détenues par des accédants, et 6,2 millions de logements occupés à titre de locataires dans le secteur privé.

 

Qu'est-ce qui empêche les jeunes ménages d'acheter de l'immobilier ?

Depuis la baisse des taux d'emprunt initiée en avril 2014, les enquêtes et sondages se suivent et se ressemblent. Oui les ménages français ont envie de réaliser un projet immobilier, oui ils comptent le faire dans les prochains mois, mais non ils ne passent pas à l'action. Et pourtant le mois dernier les taux d'emprunt ont atteint leur plus bas niveau imaginable, à 2,03 % de moyenne.

La raison invoquée par les professionnel est l'attentisme des primo accédants. Interrogée par le quotidien l'express.fr, la directrice du salon de l'immobilier Mme Olivia Milan dresse le constat. « Ce sont les primo-accédants, ceux qui achètent pour habiter, qui ne sont pas là. Ils manquent de confiance dans l'avenir ».

Car pour devenir propriétaire de son logement, il faut obtenir un prêt immobilier. Et pour cela il est nécessaire d'utiliser un apport personnel, économisé par les intéressés quelquefois au prix de sacrifices. Alors les jeunes ménages se demandent s'il ne vaudrait pas mieux conserver ce matelas en cas de perte de revenus, plutôt que de se lancer dans un projet sur 25 ans.

Et puis il y a les autres, ceux qui ne disposent pas d'un capital de départ suffisant, même si les banques ont assoupli leurs conditions avec la baisse des taux et demandent désormais moins d'apport personnel. Les ménages les moins riches bénéficient d'un certain nombre de prêts aidés, à commencer par le PTZ+.

Mais l'on en revient toujours au même problème : les banques ne prêtent qu'aux personnes travaillant en CDI, ou installées à leur compte depuis plus de 3 ans avec au moins 3 bons bilans à présenter.

 

L'investissement immobilier est-il plus avantagé ?

Si les promoteurs ont vendu 10,4 % de logements neufs supplémentaires au premier trimestre, ils le doivent surtout au locatif. Les vendeurs le reconnaissent volontiers : « le dispositif Pinel suscite l'adhésion des investisseurs ». Au mois de septembre la ministre du logement Mme Sylvia Pinel et le premier ministre M. Manuel Valls ont réussi à trouver le bon cocktail. Un mélange de souplesse de mise en location, de remises d'impôts importantes et de liberté d'utilisation.

La mesure phare étant sans doute la possibilité de louer le logement à des ascendants ou descendants, tout en bénéficiant de la défiscalisation. Les résultats ne se sont pas faits attendre, les promoteurs annonçaient déjà un regain des réservations à la fin de l'année 2014.

Tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, n'eût été le départ des primo-accédants du marché du neuf. Au premier trimestre les ventes à leur intention ont baissé de 3,3 % par rapport au premier trimestre 2014, malgré la présence du PTZ+.

Le fameux prêt immobilier à taux zéro a lui aussi été réaménagé au mois d'octobre dernier. Les zones d'éligibilité ont été élargies, et les plafonds de revenus ont été rehaussés. L'objectif affiché est de délivrer 70 000 PTZ+ en 1 an, force est de constater qu'il sera difficile de le rejoindre.

Tout d'abord le dispositif s'adresse surtout aux logements neufs, qui s'ils sont confortables, sécurisés, et parfaitement isolés, restent plus chers que les logements anciens. D'après la FPI il faut compter 3644 €/m² en province, et 4620 €/m² en Île-de-France.

En moyenne un 4 pièces familiale se vend à 378 529 € en Île-de-France, et 320 209 € en province. À ce prix là il est difficile d'être compétitif, car même si le PTZ+ peut largement compenser la différence, certaines banques ne l'entendent pas de cette oreille. Un prêt immobilier, même à taux zéro doit être remboursé, et le candidat acquéreur doit bénéficier de la capacité de paiement suffisante.

Et pourtant le PTZ+ peut également s'adresser aux acquisitions de logements anciens à la condition d'y conduire des travaux de rénovation. Et justement, la majorité des acquéreurs français ne veut pas entendre parler de travaux dans un bien immobilier. Même s'il s'agit uniquement de rénovation thermique, éligible au fameux PTZ+.

 

Les taux immobiliers restent le meilleur argument

Au premier trimestre 2015 le taux moyen des prêts immobiliers garantis par l'organisme Crédit Logement, s'est établi à 2,19 %. Un record à la baisse qui a valu aux ménages d'augmenter leur pouvoir d'achat de quelques m², quitte a emprunté sur des longues durées de 25 ans.

Résultat : de janvier à mars les banques ont prêté davantage (+23,7 %), tant et si bien qu'elles ont aujourd'hui de la peine à fournir et doivent allonger les délais de traitement. Elles traitent également davantage en termes de montant (+36 %), et ce malgré la baisse des prix du m².

Les ménages solvables peuvent donc emprunter plus, tout en remboursant sur plus longtemps, sans s'alourdir de dettes. Mois après mois le constat est le même : les conditions sont réunies pour relancer le marché de l'immobilier, il ne manque plus que la confiance des acheteurs.